L’interview du Chef Guillaume Gomez, Meilleur Ouvrier de France et Ambassadeur de France pour la gastronomie
L’interview du Chef Guillaume Gomez, Meilleur Ouvrier de France et Ambassadeur de France pour la gastronomie
« La gambas bio de Madagascar, la meilleure au monde »
Pour un pays, la gastronomie tient lieu de patrimoine culturel et fait partie intégrante de son identité. En honneur à sa valeur, elle doit être sublimée par les produits les plus rares au monde. Pour dénicher ces produits d’exception, les fins gastronomes et les plus grands chefs du monde font parfois des milliers de kilomètres, pour choisir les meilleurs terroirs, tel celui de Madagascar.
En tant que métier de passionné, la grande cuisine s’accompagne obligatoirement de techniques et de soucis du détail, poussés parfois à l’extrême. Quelques rares personnes dans le monde, des « monstres » de technicité et de savoir-faire, en sont capables et sont titrées de prestigieuses distinctions, à l’échelle de leurs pays ou même du monde, tel Paul Bocuse, Joël Robuchon, Pierre Gagnaire, Philippe Etchebest, …
Guillaume Gomez, le plus jeune à avoir obtenu le prestigieux titre de Meilleur Ouvrier de France (MOF) à 25 ans — un titre honorifique aussi convoité que les étoiles Michelin — fait honneur à son terroir natal grâce à sa passion de la grande cuisine. Chef pendant 25 ans pour les cuisines du Palais de l’Élysée, il a été au service de quatre Présidents français et y a eu l’occasion de servir les repas pour des monarques comme Élisabeth II, qui était à elle seule un pan de l’histoire à part entière. Il est aujourd’hui Ambassadeur de la gastronomie française.
La gastronomie étant un métier de découvertes et d’ouverture au monde, le Chef a accordé une interview à l’Economic Development Board of Madagascar (EDBM), afin de partager son affection pour le terroir malgache, une de ses découvertes au cours de ses innombrables voyages.
L’EDBM : Comment avez-vous découvert Madagascar et son terroir ?
Guillaume Gomez (G.G.) : J’ai découvert Madagascar avant tout grâce à une aventure humaine, avec la Fondation École de Félix, avec Mathias et Gauthier Ismail (OSO Farming). Et je connaissais aussi Madagascar parce que j’y avais séjourné quelques temps avec les différents Présidents que j’ai pu accompagner. Mais je ne connaissais ni les Malgaches, ni les produits de Madagascar, que l’on trouve très peu en France.
Et ensuite j’ai pu, grâce à la crevette bio de Madagascar, qui est la meilleure crevette au monde, découvrir Madagascar, les femmes, les hommes et les produits, ainsi que le Chef Lalaina (Ravelomanana) que je connais et qu’on voit sur les concours et les différentes rencontres à l’international. Et c’est vrai que vous avez la chance d’avoir et un terroir qui fait des produits d’exception. Donc il faut les valoriser, il faut les faire connaître, il faut surtout en prendre soin.
L’EDBM : Quels sont vos produits malgaches préférés et comment vous les cuisinez ?
G.G. : Quasiment 100% de produits que je travaillais à l’Élysée étaient des produits français. Après, la gambas bio de Madagascar étant la meilleure au monde, on se devait de la mettre à la table de l’Élysée. Et puis il y a le chocolat de Madagascar, la vanille de Madagascar, que l’on retrouve dans toutes les très bonnes cuisines du monde et pas qu’en France.
L’avantage de ces très beaux produits, c’est que vous pouvez laisser libre cours à votre imagination. Après, c’est en fonction de la cuisine que vous faites. Moi, ma cuisine était une cuisine qui se voulait assez classique, dans le sens où l’on est garant d’un certain système de cuisine et d’une histoire gastronomique française. Donc pour moi les crevettes, c’est plutôt en salé. Mais ça s’accommode très bien avec une sauce un peu aigre-douce. Et la vanille de Madagascar, vous pouvez la travailler de toutes les façons. Elle est omniprésente dans la gastronomie française depuis très longtemps. Et quand vous faites le tour des pâtisseries françaises ou des restaurants français, vous avez forcément de la vanille de Madagascar.
L’EDBM : Peut-on dire que la vanille de Madagascar est la meilleure ?
G.G. : Si c’est la meilleure ? Ça se discute ! (rires) Mais en tout cas, c’est la plus présente car il y a un très bon rapport qualité-prix et elle fait partie des meilleures. Le message qu’on peut donner, c’est qu’il faut faire attention au patrimoine que vous avez. Vous avez une vanille d’exception, à vous d’en prendre soin, à vous de la faire connaître et à vous de l’exporter comme il faut.
L’EDBM : L’Institut d’Excellence Culinaire Guillaume Gomez (avec la Fondation École de Félix), votre plus grande fierté ?
G.G. : On a monté avec la Fondation École de Félix deux instituts. C’est très récent parce que ça a seulement trois ans. On a aujourd’hui deux promotions de jeunes qui sont sorties. Une promotion de l’Ankarana, et une à Akamasoa dans le village du Père Pedro. On a des jeunes, qui avec un an de formation sont extrêmement performants. Donc bien évidemment on croit en cette jeunesse. Et c’est le message que je leur délivre : vous avez fait le choix d’une formation aux arts culinaires, et l’institut s’appelle Institut d’excellence, parce que le travail mène à l’excellence. Et une fois qu’ils ont suivi cette formation, ce sont de bons cuisiniers.
Ma fierté ce sont les jeunes, notamment dans le village d’Akamasoa, qui vivaient dans la décharge — certains y sont nés — et qui quelques années plus tard, grâce à l’enseignement qu’ils ont pu suivre avec le Père Pedro, démarrent une formation culinaire. Aujourd’hui ils ont un métier, un diplôme et donc un avenir. Donc c’est une belle fierté pour nous je pense, pour toutes celles et ceux qui s’investissent auprès des enfants de Madagascar.
L’EDBM : Quel serait votre message pour les jeunes Malgaches qui voudraient suivre votre voie ?
G.G. : Déjà, leur dire que le travail c’est toujours la meilleure des portes de sortie, et plutôt que l’oisiveté, se mettre au boulot c’est quelque chose de bien. Et dans la profession de cuisinier, il y a du travail partout, que ce soit ici à Madagascar ou dans la zone à côté à la Réunion, ou à l’île Maurice, ou dans le monde entier. Donc c’est vraiment une chance d’apprendre un métier. Moi bien-sûr je préconise celui des arts culinaires. Mais il y a plein de métiers et à partir du moment où ils apprennent, ils vivront de leur travail. Une perspective d’avenir aujourd’hui, c’est essentiel et le travail mène à ça.
L’EDBM : Que ressentez-vous aujourd’hui quand on vous parle de Madagascar ?
G.G. : Moi vous savez quand on me parle de Madagascar, j’ai tout de suite des images qui m’arrivent : le sourire des enfants que je rencontre ici, dans les Tsingy de l’Ankarana où nous allons avec l’École de Félix. Et le sourire des gens est ce que l’on apporte avec la Fondation et l’organisation du Père Pedro, à tous ces enfants et toutes ces familles, donc c’est forcément de la joie et des sourires. Et dès qu’on me parle de Madagascar, j’ai forcément le sourire des Malgaches qui arrive et forcément, j’ai le sourire !
L’EDBM : L’on pourrait donc dire que vous êtes tombé amoureux de Madagascar ?
G.G. : Ah oui j’en suis là ! Parce que je reviens maintenant dès que je peux, j’y fait différents séjours avec les deux instituts que j’ai pu ouvrir en collaboration avec la Fondation École de Félix. Alors oui, moi j’invite toutes celles et ceux qui le peuvent, à venir découvrir Madagascar. Et c’est sûr, ils tomberont amoureux de Madagascar, des gens, du climat, du pays, des produits,… c’est une belle aventure !
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